La balustrade est, au sens strict, composée d’une rangée de balustres surmontés d’une tablette. On dit, par ailleurs, d’un élément qu’il est classique lorsqu’il est inspiré de l’Antiquité gréco-romaine.
Vous en déduisez sans doute que les Grecs et les Romains l’utilisaient. Erreur, elle était absente chez eux, ils préféraient les garde-corps pleins mais leurs superbes colonnades sont dans le même esprit et la balustrade est « devenue » gréco-romaine par analogie.
Les Grecs la connaissaient certainement puisque des bas-reliefs vieux de près de trois mille ans nous montrent des balustrades chez les Phéniciens, les inventeurs de l’alphabet, un peuple de commerçants avec lequel les Grecs ont eu de nombreux contacts. La balustrade est d’ailleurs un élément sans doute plus ancien, l’invention du tour étant bien antérieure. L’architecture a toujours repris des éléments existants pour créer une nouvelle esthétique . Nous en avons là un bel exemple.
Faute de nous avoir été transmise par les Romains, la balustrade apparait chez nous seulement à l’époque gothique, sur les cathédrales, mais souvent avec des formes ogivales vite abandonnées et apparemment absentes à Arcachon.
Grande admiratrice de l’Antiquité gréco-romaine, la Renaissance italienne va paradoxalement l’adopter et lui donner son nom. La balustrade en pierre devient à la mode pour les balcons, les escaliers, les terrasses, mais aussi pour décorer le haut des murs des palais et châteaux. Les balustres, dont le nom évoque la fleur de grenadier qui leur ressemble, s’inspirent des colonnes grecques ou toscanes. Ils sont disposés en groupe, séparés par des piédestaux, eux mêmes surmontés de statues, de vasques ou de pots à feu.
Les rois de France, revenant des guerres d’Italie avec de nombreux artistes italiens, l’adoptent pour leurs châteaux. Chambord en est un magnifique exemple. La balustrade devient à la mode, elle va d’abord remplacer les créneaux devenus inutiles de nombreux châteaux-forts en France, avant de décorer les châteaux plus élégants et plus confortables que la Noblesse fera construire.
Parallèlement, les « quatre livres d’architecture » de l’architecte italien Palladio vont diffuser dans toute l’Europe puis en Amérique du Nord le goût de l’architecture italienne de la Renaissance.
Au 17ème et 18ème siècle, la balustrade classique se généralise, s’enrichit et participe au décor des palais et demeures de prestige dont Versailles devient la référence en Europe. Elle y renforce les lignes horizontales de la construction, modifiant profondément l’aspect des châteaux. La toiture très plate cachée par une balustrade devient une des principales caractéristiques de l’architecture civile baroque qu’on dit aussi classique lorsque l’inspiration gréco-romaine et en particulier les colonnes et les pilastres s’allient avec la sobriété de la décoration.
A la fin du 19ème siècle, les psychologues ont montré que la répétition d’un même élément suivant un rythme régulier engendrait un sentiment de beauté qui est attribué à notre héritage culturel gréco-romain. Là est sans doute le secret de la balustrade.
A Arcachon, la balustrade classique n’est pas très fréquente car elle est évidemment absente des chalets inspirés de l’époque médiévale. Elle décore généralement les « pavillons nobles« , type bien particulier de villa dont on parle peu à Arcachon.
S’il vous manque un balustre, point n’est besoin d’extraire un bloc de pierre et de l’usiner au tour. Depuis la fin du 19ème siècle se sont multipliés les catalogues de balustres industrialisés, de toutes les formes et dimensions, en pierre reconstituée, donc relativement peu coûteux.
Francis Hannoyer