C’est l’un des plus beaux paysages d’Arcachon. Aucun document touristique ne signale ce lieu, on le découvre en passant et le plaisir n’en est que plus grand.Si vous voulez l’admirer, allez un jour calme en haut de la dune des Abatilles, avenue du Parc, de préférence en début de journée quand l’air est transparent et que la presqu’ile du Cap-Ferret apparait toute proche, ou le soir quand le soleil colore le ciel de couleurs rouges. Vous n’entendrez sans doute pas le bruit des vagues, vous n’aurez peut-être pas les senteurs de la mer, mais le chant des oiseaux et l’odeurs des pins vous incluront rapidement dans le paysage. Pourquoi trouvons-nous ce paysage si beau ?

Sa structure est simple, il se lit facilement. Le point de vue en hauteur permet de distinguer plusieurs plans bien définis, ce qui donne aussi de la profondeur. Le premier plan constitué par les arbres est essentiel : la verticalité des troncs et l’arbre penché structurent le paysage, contrebalançant les nombreuses lignes horizontales. Faites un test, essayez d’imaginer notre paysage sans ces arbres, il vous paraîtra plat, presque banal. Par ailleurs, le rideau d’arbres, plus sombre, conduit naturellement notre regard vers la partie éclairée, accentuant le sentiment de profondeur. En deuxième plan, la plage, puis l’eau calme du bord avec les bateaux au mouillage évoquent bien les vacances et la détente. La presqu’ile du Cap-Ferret, qui nous invite à traverser, et le ciel bleu complètent un tableau bien structuré et plutôt idyllique

Ce paysage est très cohérent. Il est large, étendu, donne l’impression qu’il se prolonge à l’identique de chaque côté. Une impression de calme et d’immobilité se dégage de tous ses éléments: la végétation du premier plan, le sable de la plage, la mer avec ses bateaux immobiles au mouillage, la ligne d’horizon constituée par la presqu’ile du Cap-Ferret. Un horizon à l’infini donnerait un sentiment d’immensité pouvant déclencher un certain angoisse, celle de la haute mer. A l’inverse, avec une ligne d’horizon cachée ce ne serait plus un paysage, juste un espace plaisant. Ce n’est pas le cas ici, tout est à notre échelle, rassurant. A l’exception des bateaux qui sont des produits de l’activité humaine, mais qui sont parfaitement intégrés dans le paysage, nous sommes en face de la Nature et cette vision réveille certainement chez nous de nombreux mythes, tel celui du paradis terrestre. Certains éléments, comme l’eau ou les bateaux, exercent sur nous une fascination et leur présence est essentielle ici car elle nous fait rêver. Regarder un paysage, c’est en fait dialoguer avec lui.

La mer est toujours plus belle, vue à travers un léger rideau végétal comme premier plan, et les pins se prêtent admirablement à cette mise en scène. La règle est bien connue, mais elle est souvent oubliée par les propriétaires comme par les élus

La présence d’un rideau d’arbres, permet également d’améliorer le paysage pour ceux qui arrivent à Arcachon en bateau et cela joue beaucoup dans la réputation d’une station balnéaire car les cartes-postales en sont beaucoup plus belles.

Le meilleur exemple à Arcachon est celui de la résidence Front de Mer, au Moulleau : les habitants de ce quartier, regroupés dans leur association, se sont battus, il y a trente-cinq ans, pour obtenir un rideau d’arbres entre l’immeuble et la plage. Le résultat est convaincant en matière de paysage : les appartements jouissent d’une belle vue,  l’immeuble est beaucoup plus discret. Il est dommage que l’exemple n’ait pas été suivi dans certains quartiers, mais il n’est pas trop tard pour rectifier cette erreur.

Francis Hannoyer

panorplagemoulleau

A travers les arbres